LES FABULATIONS DE NICOLAS WILMOUTH

 

Il faudrait inventer un mot ou plusieurs pour parler des œuvres du photographe Nicolas Wilmouth qui ont toutes à voir avec le récit et l’histoire, la grande comme la petite. Ce mot pourrait être Fabulations. Des Fabulations comme les Merveilles des cabinets de curiosité, les petits arrangements avec les représentations de la finitude (Still Life), les portraits d’enfants géants (Héritiers), ou encore les rébus d’un photo-peintre (HaÏkus). C’est aussi une certaine histoire de l’art qui se joue ici, celle des natures mortes du XVII è siècle en peinture ou celle de la photographie pictorialiste au XIX è, entre autres, car Nicolas Wilmouth revendique un travail d’atelier à l’ancienne sur les fonds et les prises de vue. Ici pas de trucage numérique mais des fonds travaillés au blanc d’œuf. Pourtant, si la reconnaissance des figures est de mise pour le spectateur qui devient ici partie prenante de la scène, le photographe joue avec les codes et les paradoxes. Ainsi se glissent souvent des éléments anachroniques dans les scènes de genre : des gaufrettes à la vanille industrielles posées sur un plat d’argent, des dates de péremption sur des œufs ou plus subtilement un clou à tête ronde quand ils étaient de section carrée au XVII è siècle. Ou encore, deux époques fusionnent lorsque l’absurde d’un montage surréaliste se mêle à une composition en apparence plus classique. Se mélangent aussi dans ces œuvres le récit que fait l’artiste dans ses compositions, autant que la fable que s’invente le spectateur de l’exposition. Ce qui reste vrai et qui rassemble tout et tous dans un rêve éveillé, c’est la lumière qui permet ces images, c’est la poussière qui façonne les objets, c’est la fumée d’une bougie qui s’échappe et la sensualité révélée des objets. On voyage dans le temps, oui, mais les deux pieds dans la vérité des choses.

Sophie Coiffier –  Docteure en arts Plastiques, Auteure